Dans une tribune publiée dans Le Point, Clément Jeanneau, cofondateur de Blockchain Partner, et Gilles Babinet, entrepreneur et spécialiste des enjeux du numérique, appellent les pouvoirs publics à mettre en place une véritable stratégie pour développer et favoriser les technologies blockchain en France. « Le nouveau quinquennat doit être l’occasion de saisir la balle au bond », écrivent-ils.
Parmi les pistes évoquées, ils suggèrent de s’efforcer de réduire la pénurie de très bons développeurs blockchain en France, en favorisant les cursus spécialisés au sein des écoles d’ingénieurs et d’informatique, et en facilitant l’installation en France de développeurs étrangers ; d’apporter une reconnaissance et un soutien officiel aux différentes startups et initiatives blockchain de l’écosystème français, comme le réseau Chaintech, ainsi qu’aux chercheurs qui travaillent sur ces technologies ; ou encore de poursuivre avec ambition les premiers projets destinés à clarifier le régime juridique des cas d’usage.
Ces propositions sont d’autant plus réalistes, écrivent les auteurs, qu’elles ne nécessitent pas de dépenses publiques conséquentes. Il s’agit avant tout de signaux positifs à envoyer, et de mise en valeur des acteurs blockchain français et des initiatives en la matière.
Clément Jeanneau et Gilles Babinet estiment néanmoins qu’une politique plus ambitieuse est envisageable : celle-ci serait fondée sur le lancement d’ « une ou plusieurs expérimentations publiques sous la forme de proof of concept pour tester à coûts réduits les opportunités que représente la blockchain pour les pouvoirs publics ». Ils soulignent ainsi que Dmitri Medvedev, le Premier Ministre russe, a demandé au printemps dernier à deux de ses ministres de mener des études sur les opportunités de la blockchain pour l’administration. Concrètement, les terrains d’expérimentations imaginables sont très nombreux : l’Australie expérimente le vote en ligne via la blockchain, le Royaume-Uni teste la traçabilité des dépenses de prestations sociales, la Suède et la Géorgie travaillent sur des cadastres reposant sur une blockchain, et l’Estonie utilise d’ores et déjà cette technologie pour la gestion des données médicales de ses habitants.
Extraits :
« Trois principes pourraient guider les pouvoirs publics :
D’abord, penser et agir « écosystème » : plus que pour toute technologie, les acteurs de la blockchain sont multiples, composés avant tout de start-up et d’indépendants, souvent plus au fait des dernières avancées techniques que les grands groupes ou les cabinets de conseil. Il est dès lors essentiel de capitaliser sur cette communauté dynamique et de la faire travailler avec les autres acteurs (institutions, grands groupes, recherche…) dans une démarche d’open innovation – et ce, d’autant plus que prolifèrent les arnaques et pseudo-expertises qui font perdre à tous un temps précieux.
Deuxième recommandation : éviter le piège des approches en silos, compartimentées. Une stratégie pertinente serait, lors de la sélection des filières-clefs à viser en priorité (car il s’agira de faire des choix, plutôt que de viser trop large), d’intégrer dans la réflexion les autres technologies d’avenir. Il est par exemple essentiel d’associer la blockchain avec l’Internet des objets pour les enjeux de traçabilité dans la logistique.
Enfin – et il est malheureux de devoir encore le rappeler en 2017 – il est vital de protéger le chiffrement et les cryptomonnaies, sans lesquels les technologies blockchain perdent une grande partie, si ce n’est l’ensemble, de leur intérêt…»