Peut-on qualifier une levée de fonds d’Initial Coin Offering (ICO) alors même qu’elle ne respecte pas l’une des caractéristiques les plus fondamentales des technologies blockchain : la transparence ? Les cas de récentes ICOs semble indiquer que oui…A nos yeux, un seuil d’alerte est désormais franchi.
Nous publions aujourd’hui une tribune avec de nombreux acteurs importants de la communauté blockchain française pour alerter sur l’opacité entourant certaines ICOs, et pour appeler à une plus grande vigilance de l’écosystème.
Extraits :
Ces dernières semaines, nous avons constaté une tendance inquiétante d’ICOs bafouant les règles les plus élémentaires. Smart contract absent ou incomplet, conditions de vente des tokens floues, équipe d’advisors en partie fictive ou inattentive, agences de notation qui ne remplissent pas leur rôle… Mises bout à bout, ces approximations ou violations des bonnes pratiques peuvent constituer des bombes à retardement.
Au coeur du problème : un grave manque de transparence dont il est essentiel de prendre conscience, afin qu’émerge une (meilleure) auto-régulation des acteurs.
Ce manque de transparence se retrouve concrètement à trois échelons : dans la technologie employée, dans le rôle des advisors, et dans la responsabilité des agences de notation.
1/ Transparence de la technologie
Seuls le déploiement d’un smart contract sur une blockchain publique ou la publication des adresses utilisées pour la levée permettent d’auditer en temps réel et en transparence le déroulement d’une ICO. A défaut, il est impossible, par exemple, de connaître en temps réel le montant de cryptomonnaies récolté par l’entreprise. C’est cette opacité qui pose problème par exemple pour l’ICO du projet DomRaider.
2/ Transparence sur le rôle des advisors
Leur rôle n’est pas véritablement connu. Réalisent-ils tous une due diligence digne de ce nom, ou certains sont-ils simplement rémunérés en échange de leur image, sans avoir à aucun moment étudié le projet en question ? A l’heure actuelle, un grand flou règne sur cette question pourtant cruciale dans la décision des investisseurs. Nous constatons un dérapage sur le “mercato” des advisors aux ICOs. Or ces advisors apportent un tampon de crédibilité, très recherchée, sans laquelle certaines ICOs n’auraient pas pu convaincre les investisseurs. Souvenons-nous de l’affaire TheDAO.
3/ Transparence sur le rôle des agences de notation d’ICOs
Quel rôle exactement jouent ces agences, que l’on a vu fleurir au cours des derniers mois ? Leur travail d’analyse technique des ICOs reste parfois très superficiel, en témoigne le cas de DomRaider. En l’absence de clarté sur la question, cette ambigüité est très problématique car elle peut laisser croire à des dizaines de milliers d’investisseurs qu’une ICO est sérieuse techniquement alors même que sa solidité technique n’a pas été vérifiée.
Si nous voulons que cet outil extraordinaire de financement et de mobilisation des communautés garde son efficacité, il faut dès à présent mettre en place des bonnes pratiques et s’y tenir. Les ICOs qui les enfreindraient ne devraient plus bénéficier de blanc-seing de la part de l’écosystème blockchain et de ses acteurs.
Dès lors, il est plus que jamais nécessaire que les entrepreneurs créateurs d’ICOs, les acteurs techniques et juridiques qui les entourent et les autres parties prenantes que sont les advisors et les agences de notation avancent vers une autorégulation plus exigeante, avec comme instrument premier la transparence. C’est la confiance à l’égard de notre écosystème émergent qui est en jeu.