La blockchain NEO, une imposture ?

Deuxième numéro de la Token Letter, newsletter dédiée au web décentralisé et au monde des tokens
Après le premier volet, Comprendre NEO, le « Ethereum chinois », qui présentait les grands principes de cette blockchain, nous examinons cette semaine les arguments en sa faveur et en sa défaveur, avec une question en tête : faut-il prendre au sérieux les promesses de NEO, dont l’ambition est de devenir « la blockchain n°1 au monde » selon les dires de ses fondateurs ?

NB : si vous êtes néophytes dans la « token économie », pas de panique ! Face au jargon, consultez le lexique de la blockchain, en attendant la sortie du premier rapport dédié au web décentralisé, à paraître en avril, pour une (re)mise à niveau.

SYNTHESE EN 3 POINTS

■ La blockchain NEO présente des caractéristiques la rendant prometteuse sur le papier :
Des atouts techniques. 1/ Son nombre de transactions par seconde est annoncé comme largement supérieur à Ethereum, et doit être boosté par la solution dite « Trinity », censée permettre, selon l’équipe de NEO, de réaliser à terme 99 millions de transactions par seconde, contre 1 million pour Ethereum via le Raiden Network. 2/ Il est possible d’utiliser plusieurs langages de programmation courants pour développer des applications sur la plateforme. 3/ L’exécution des e-contracts est annoncée comme étant optimisée pour être plus efficiente que sur Ethereum.
Des mécanismes économiques incitatifs, qui poussent à la croissance de NEO. 1/ Les internautes ont une incitation spécifique à acquérir et conserver des tokens NEO (dont la possession donne en effet droit à des dividendes versés de façon proportionnelle). 2/ Les détenteurs de tokens NEO ont une incitation économique à ce que de nouveaux utilisateurs rejoignent le réseau et à ce que chacun l’utilise activement (l’inscription et l’échange d’actifs déclenchent en effet le versement de dividendes à tous les détenteurs de tokens NEO). 3/ Le mécanisme de conception des double tokens incite à conserver des frais de transactions (très) faibles.
Un positionnement government-friendly qui en fait un des acteurs blockchain les plus crédibles aujourd’hui pour être soutenu par le gouvernement chinois – un atout important pour réussir dans cette économie numérique particulière.■ Deux grands points noirs, cependant, conduisent à se montrer au mieux prudent, si ce n’est sceptique, sur cette blockchain qui est même considérée par plusieurs observateurs comme une imposture.
▹ NEO est extrêmement centralisé. Au lieu de milliers de nœuds répartis dans le monde entier, comme c’est le cas pour Bitcoin ou Ethereum, sa blockchain compte aujourd’hui seulement 7 nœuds validateurs dans tout son réseau, entièrement contrôlés par l’équipe de NEO !
▹ Les belles promesses affichées par NEO ne résistent aujourd’hui pas à l’épreuve de la pratique. Un grand nombre d’ICO conduites sur NEO ont fait l’objet de vives critiques, plusieurs étant qualifiées de désastres. Le niveau technique de l’équipe de NEO et la solidité même de leur blockchain sont très questionnés. En octobre 2017, la blockchain de NEO a été entièrement arrêtée pendant plusieurs heures. Pour couronner le tout, les chiffres avancés sur le nombre de transactions par seconde sont contestés, de même que la possibilité d’utiliser facilement des langages courants pour développer. Du reste, seuls 20 e-contracts sont effectivement déployés à l’heure actuelle sur NEO !

■ Pour ces raisons, il nous est difficile d’être aujourd’hui très enthousiastes sur cette plateforme, même si les choses peuvent encore évoluer puisque NEO n’en est encore qu’à ses premiers pas, malgré sa valeur de marché importante… Les fondateurs de NEO, qui assument la centralisation actuelle, promettent qu’ils évolueront vers plus de décentralisation à l’avenir…reste à savoir dans quelle mesure.

I – Raisons d’y croire selon ses défenseurs

• Des applications multiples ont vocation à y être développées, comme sur Ethereum. Le white paper cite par exemple : « e-contracts compliant avec la réglementation, exchanges décentralisés, marchés de données, marchés d’échange de propriété intellectuelle, marchés prédictifs, marchés publicitaires, réseaux sociaux etc. »

• Un nombre bien plus important de langages de programmation que sur Ethereum est accepté sur NEO pour construire des Dapps : Python, Java, C#, VB.Net, C, C++, Javascript. L’adoption de NEO devrait en être facilitée.

• L’écosystème autour de NEO est en développement, porté par les travaux d’un groupe de développeurs open source appelé City of Zion (CoZ) qui se présente comme « indépendant et international » et qui travaille spécifiquement sur NEO. Des premières ICO ont commencé à choisir NEO plutôt qu’Ethereum.

• Grâce à son algorithme, NEO affirme pouvoir aujourd’hui supporter en théorie (vitesse maximale mathématiquement possible) 10 000 transactions par seconde contre 30 pour Ethereum dans son système actuel, et en pratique 1000 transactions par seconde, contre 15 pour Ethereum – des chiffres qui sont toutefois contestés par certains.

• En outre, le travail sur la scalabilité (passage à grande échelle) est lui aussi annoncé comme étant très prometteur via la solution de state channel Trinity, qui doit permettre à terme 99 millions de transactions par seconde, contre 1 million pour Ethereum via le Raiden Network. Trinity est un « lightning network » pour NEO qui vise à permettre des paiements en temps réel, de faibles frais de transaction, et la protection de la confidentialité pour les actifs NEO. (Pour plus d’infos, lire cet article)

• Le système de dividendes versés sous forme de GAS est particulièrement intéressant économiquement pour les détenteurs de tokens NEO, qui n’ont qu’à engranger passivement ces dividendes, versés en proportion de leur investissement en tokens NEO. Ce mécanisme, en incitant à acquérir et à conserver le plus de tokens NEO possibles, favorise l’arrivée de nouveaux investisseurs qui viennent renforcer l’écosystème. Ce système est rendu possible par l’existence des double tokens.

• Les détenteurs de tokens NEO ont une incitation à ce que nouveaux actifs soient enregistrés sur la blockchain NEO : ils reçoivent en effet des dividendes, sous forme de GAS, au moment de l’enregistrement et de l’échange des actifs (actions qui nécessitent de payer en GAS). Ils sont donc incités à ce que de nouveaux utilisateurs rejoignent le réseau et à ce que chacun l’utilise activement.

Le système de double tokens incite à conserver des frais de transactions (très) faibles. En effet, l’existence de frais de transactions élevés, qui bénéficieraient uniquement aux nœuds délégués, freineraient les utilisateurs dans leur volonté d’enregistrer leurs actifs sur la blockchain NEO. Or moins il y a d’actifs enregistrés, moins les détenteurs de tokens NEO reçoivent de dividendes (GAS). Ainsi, les détenteurs de tokens NEO sont incités à voter pour les délégués qui conservent des frais de transactions bas. Ce système doit permettre d’attirer de nombreux utilisateurs sur NEO vis-à-vis des autres blockchains.

L’exécution des e-contracts est décrite comme étant optimisée : le code est réorganisé en amont de l’exécution du contrat, afin de le rendre plus efficient. Ce mécanisme prend un peu plus de temps que sur Ethereum dans la phase initiale d’exécution du contrat, mais est censé rendre le processus nettement plus efficient sur le long terme, selon les fondateurs de NEO.

NEO compte collaborer avec les autorités, en particulier chinoises. Son attitude regulatory-friendly se manifeste par son approche centralisée (son fondateur juge qu’une approche centralisée peut être « plus autoritaire au début mais au bout du compte plus démocratique »). Le whitepaper insiste sur la volonté de NEO de respecter les réglementations et montre que l’écosystème NEO a été construit dès le départ dans cet optique. Outre l’affirmation selon laquelle les tokens NEO ne constituent pas une monnaie virtuelle, NEO affirme aussi avoir mis en place des API pour les exigences de KYC (Know Your Customer) et AML (Anti Money Laundering), ainsi qu’un système de récupération de ses actifs si l’on perd ses clefs privées.

Ces aspects sont jugés cruciaux par les partisans de NEO. A l’heure actuelle, la Chine bannit les ICO et les exchanges sur son territoire. Il est toutefois envisagé que cette décision soit provisoire et que la Chine s’ouvre plus à l’avenir, sous certaines conditions – elle cherchera probablement à garder un certain contrôle. Vu sous cet angle, l’avenir de NEO peut être très prometteur en Chine, étant donné que la Chine a l’habitude d’utiliser les plateformes numériques développées sur son territoire.

Cette perspective est d’autant plus crédible que les interdictions décidées par la Chine récemment sont vues par beaucoup justement comme un signe de reconnaissance de la puissance des technologies blockchain. Ces interdictions permettent à la Chine de prendre le temps de concevoir un plan qui lui permettra de contrôler le développement et la direction que prendra la « disruption blockchain » sur son territoire.

Certains se demandent si la Chine ne réfléchirait pas actuellement à créer sa propre blockchain. Cette option ne semble pas la plus probable si l’on considère la stratégie chinoise conduite jusqu’ici dans l’économie numérique. Ainsi, la Chine n’a pas créé ses réseaux sociaux étatiques, mais a banni les réseaux sociaux occidentaux pour promouvoir Tencent. En échange, Tencent accepte de rester en conformité avec les réglementations, d’employer des travailleurs chinois, et de collaborer avec l’Etat notamment lorsque celui-ci impose des censures. La même logique pourrait être suivie dans le cas de la blockchain. Dans cette perspective, NEO est bien positionnée à l’heure actuelle pour devenir la plateforme blockchain de référence en Chine.

II – Les critiques de ses détracteurs

NEO est extrêmement centralisé : au lieu de milliers de nœuds répartis dans le monde entier, NEO a aujourd’hui moins d’une dizaine de nœuds validateurs dans tout son réseau : 7 exactement ! Plus encore : à l’heure actuelle l’équipe de NEO dispose d’un contrôle centralisé sur l’ensemble de ces noeuds.

L’équipe de NEO a annoncé un accroissement de la décentralisation de son réseau, en répartissant les nœuds dans différents lieux dans le monde (en Suisse, aux Pays-Bas…) ; mais elle contrôle et gère toujours ces nœuds. La décentralisation dont il s’agit est donc uniquement géographique, et non pas dans le contrôle des nœuds.

Comme l’écrit l’auteur du site StoreOfValue qui s’est penché de près sur NEO, « si plus d’1/3 des nœuds, soit plus de 3 nœuds sur les 7, deviennent inopérants, le consensus ne peut plus être atteint et la blockchain s’arrêtera. NEO dit qu’un modèle décentralisé peut tout de même être construit sur ce système en donnant la possibilité à la communauté de voter pour les utilisateurs qui feraient fonctionner un nœud. J’ai découvert que les développeurs de NEO ont codé en dur les adresses de chaque nœud validateur dans le code de base. En outre, le wallet officiel est relié à ces valeurs codées en dur. Chacune de ces adresses pointe vers un serveur contrôlé par NEO. La présence de ces valeurs codées en dur signifie que le réseau NEO entier repose sur l’existence de 7 serveurs contrôlés entièrement par l’équipe de NEO. ».

En conclusion, il estime que « la blockchain de NEO est avant tout une base de données propriétaire que l’équipe peuvent modifier ou fermer à tout moment. NEO n’est pas une cryptomonnaie : c’est une base de données centralisée, qui est loin d’être décentralisable. Ceci explique aussi pourquoi l’équipe de NEO est aussi réticence à ouvrir publiquement les serveurs de validation. Ils ne peuvent pas ! Ils peuvent juste en donner quelques-uns à la communauté City of Zion et s’assurer qu’elle ne fermera jamais les nœuds validateurs qu’ils font tourner. En outre, le fait de donner à City of Zion quelques nœuds validateurs ne signifie pas décentraliser le réseau. C’est juste un accord formel entre deux entités, comme si Netflix faisait fonctionner ses serveurs chez Amazon ».

• Cette centralisation a déjà posé problème très concrètement par le passé : en octobre dernier, la blockchain de NEO a été entièrement arrêtée pendant plusieurs heures, empêchant ainsi la génération de nouveaux blocs et perturbant ses utilisateurs, qui n’avaient pas d’informations. La raison invoquée : l’équipe de NEO avait dû bloquer le réseau pour effectuer des « vérifications manuelles ». En réalité, l’un des nœuds de consensus gérés par l’équipe NEO s’était arrêté et le consensus ne pouvait plus être atteint. L’équipe NEO a dû s’introduire manuellement dans le système pour le redémarrer.

Le niveau technique de l’équipe de NEO et plus encore la solidité même de leur blockchain sont très questionnés. Sans entrer ici dans les détails, voir par exemple ce thread. L’auteur montre notamment une déclaration récente d’un responsable de la R&D chez NEO, où l’on découvre que le réseau ne parvient pas à surmonter un obstacle technique d’une simplicité étonnante pour un système censé être ‘Byzantine Fault Tolerance’. La conclusion du thread est claire : « NEO n’est pas un système de consensus ‘Byzantine Fault Tolerant’. NEO n’est même pas un système de consensus ‘fault tolerant’ ».

Et l’auteur de conclure : « Sans exagération, c’est le signe le plus fragrant d’incompétence que j’ai jamais vu pour un projet dans cet univers. Aucun projet avec une quelconque forme de revue de code n’aurait permis qu’une telle chose se produise ».

Ce sentiment de légèreté et d’absence de rigueur sur le plan technique de la part de l’équipe NEO est partagé par d’autres membres de la communauté crypto ayant investigué le projet au-delà de ses déclarations.

Les chiffres avancés par l’équipe de NEO sur le nombre de transactions par seconde, censé être nettement supérieur à Ethereum, sont très contestés (voir notamment cet article).

• La liberté d’utiliser de nombreux langages de programmation courants peut devenir un boulet pour NEO, pour deux raisons. D’une part, cela accroît les risques de failles de vulnérabilité : NEO devra multiplier les audits de sécurité, très régulièrement, pour s’assurer que les e-contracts fonctionnent correctement et ne présentent pas de failles. D’autre part, cela risque de compliquer l’optimisation générale de tous les e-contracts qui fonctionnent sur la plateforme, en raison des différences entre les langages de programmation.

• Un signe révélateur : le GitHub de NEO est nettement moins actif que celui des autres blockchains.

Très peu de e-contracts sont effectivement déployés : seulement une vingtaine sont déployés à l’heure actuelle sur NEO (https://neotracker.io/browse/contract/1). Un chiffre étonnant pour une plateforme de smart contracts qui a plus de deux ans et qui vaut plus de 4 milliards de dollars. Il y a encore trois mois, seuls 6 étaient déployés (sur le mainnet) sur NEO. Une des raisons de ces chiffres tient notamment dans le coût considérable de déploiement d’un e-contract sur NEO à l’heure actuelle.

Les premiers projets et ICO effectués sur NEO ont fait l’objet de vives critiques.
Le projet AdEx avait annoncé en août son passage d’Ethereum à NEO. Il y a encore quelques semaines, il continuait pourtant encore de publier du code en Solidity sur son repository GitHub (Solidity étant le langage pour développer les smart contracts d’Ethereum)…
Le projet Red Pulse, qui a réalisé la première ICO effectuée sur NEO, a été très critiqué ; ce fût pire encore pour l’ICO suivante, portée par le projet Aphelion dont beaucoup considèrent qu’il s’agit d’un scam, y compris dans la communauté de NEO.
Autre exemple : le projet Trinity, la 2e plus grande ICO réalisée sur NEO à ce jour (20 millions de dollars levés), a subi de nombreux messages très négatifs sur l’amateurisme de son équipe (cf par exemple cet avis : « Cette ICO est à l’opposé de ce qu’on peut considérer comme un succès. Ils ont atteint leur cap mais quelle désorganisation ! Sites web down, wallets NEO qui ne fonctionnaient pas, scammers absolument partout… »).
Enfin, pour couronner le tout, le projet TheKey, 4e plus grande ICO réalisée sur NEO, a suscité tant de désapprobations (« une horreur : non seulement le site était down avant, pendant et après la crowdsale, mais pendant tout ce temps le channel Telegram a été spammé par des messages scam et porno, sans ce que les modérateurs n’agissent, et l’équipe du projet a changé le prix du token 1h avant le début de la crowdsale » écrit un investisseur sur Reddit) qu’elle a d’ores et déjà été qualifiée de « pire ICO réalisée en 2018 »…

• Enfin, de nombreux utilisateurs soulignent la difficulté, en pratique, d’utiliser NEO, notamment pour développer des smart contracts. « C’est vraiment mauvais en termes de code ; j’ai essayé de construire des smart contracts sur NEO, il y avait de nombreux bugs » témoigne l’un d’eux sur Reddit. Un autre écrit : « Leurs smart contracts sont quasi inutilisables à l’heure actuelle. Le workshop qui a été organisé pour les développeurs était une blague. La plupart des gens ont à peine pu configurer l’environnement nécessaire pour développer les smart contracts. Enfin, le support « multi langages » est un mensonge car même si vous pouvez écrire vos contrats en Python, vous ne pouvez rien utiliser de ce qui rend le langage utile »…

Conclusion

Si la forte centralisation de NEO, bien qu’aberrante technologiquement pour une blockchain, constitue sans doute un atout vis-à-vis des autorités chinoises, les nombreuses critiques présentées ci-dessus permettent difficilement d’être enthousiastes à ce jour sur cette blockchain, son équipe et son écosystème. A l’avenir, tout en gardant un œil sur NEO qui n’en est qu’à ses débuts, qui a atteint une valeur de marché considérable en seulement deux ans, et pour lequel les fondateurs promettent d’aller vers plus de décentralisation à l’avenir, il faudra suivre le développement d’autres projets asiatiques d’envergure dans le monde blockchain, à commencer par Qtum (prononcer « Quantum ») une autre plateforme blockchain chinoise (qui permet de faire fonctionner des smart contracts sur la Ethereum Virtual Machine, par-dessus une infrastructure issue du code de Bitcoin), elle aussi parfois surnommée le « Ethereum chinois »… .

Sources principales :
https://steemit.com/cryptocurrency/@basiccrypto/almost-everything-you-wanted-to-know-about-neo-part-2-of-2
http://storeofvalueblog.com/posts/neo-responded-to-my-article-and-it-confirms-my-worst-fears/
https://coinpickings.com/neo/
http://storeofvalueblog.com/posts/major-neo-redflags/
https://www.coinbureau.com/analysis/neo-is-much-more-than-chinese-ethereum/
https://hackernoon.com/neo-versus-ethereum-why-neo-might-be-2018s-strongest-cryptocurrency-79956138bea3
https://cryptovest.com/reviews/ico-review-neo-the-new-chinese-ethereum/
https://medium.com/@MalcolmLerider/clarification-on-neo-gas-and-consensus-nodes-aa94d4f4b09

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